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« Girls Will Be Girls » : un premier film sur l’éveil à la sexualité d’une adolescente indienne et de sa mère

L’AVIS DU « MONDE » – À VOIR
Premier long-métrage de la réalisatrice indienne Shuchi Talati, Girls Will Be Girls reconduit un thème traité d’innombrables fois au cinéma, sorte d’invariant sur lequel il faut, à intervalles réguliers, se repencher sans cesse : le chemin pavé d’embûches qu’est l’éveil à la sexualité des jeunes filles. Mira, 16 ans, est une élève modèle dans un pensionnat huppé du nord de l’Inde. Nommée élève responsable de la discipline, la jeune fille a pour mission de surveiller le comportement de ses pairs, quitte à les alerter au moindre écart de conduite ou flirt dans les couloirs.
C’était sans compter sur son propre trouble lorsque Sri, un élève fraîchement arrivé de Hongkong, intègre son pensionnat : bientôt amoureux, ils prétextent, pour se retrouver, des sessions de travail qui se déroulent chez Mira, sous le regard méfiant de sa mère, Anila, jeune femme au foyer passée à côté de sa vie et de sa sexualité.
De ce canevas on ne peut plus classique, on pouvait craindre un traitement conventionnel, mettant platement dos à dos l’émancipation d’une jeune fille et le rigorisme d’une bourgeoisie indienne ultrapolicée, maintenant dans l’ignorance du sexe ses jeunes filles, tandis que les garçons, échappant à la surveillance, consomment du porno et ne subissent pas les affres de la « première fois ».
Mais c’est dans ses écarts, tours et détours, que Girls Will Be Girls s’avère bien plus complexe et sophistiqué, et glisse sans cesse de son programme officiel pour flouter toutes les frontières : chaque être peut être tour à tour l’émissaire rigide d’une morale puritaine ou victime d’un désir qui le déborde, surveillant ou surveillé. La société indienne n’y est pas filmée comme un monolithe rigide, mais un territoire traversé de contradictions, où désir et censure parlementent, s’arrangent entre eux, fixent des règles : tout est possible à qui s’abstrait du regard de la société, reste discret.
Dans un style élégant et langoureux, frôlant par moments une agréable torpeur, Shuchi Talati circule entre sphère sociale et recoins d’intimité – chacun y trouvera des échos de sa propre découverte adolescente, entre mains effleurées, révisions teintées d’érotisme, éducation anatomique dispensée sur Internet –, sans que le film ne tombe jamais dans la mièvrerie.Et le récit de s’enrouler autour d’un improbable trio amoureux lorsque Sri tombe dans la toile d’araignée de la mère, qui se confie à l’adolescent, flirte avec lui, s’offre l’occasion de vivre une jeunesse arrachée par un mariage précoce.
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